La proposition de supprimer le lundi de Pâques et le 8 mai fait débat.
Mais au-delà des enjeux politiques, cette mesure pourrait avoir des conséquences économiques majeures sur le secteur touristique français.
Didier Arino, directeur général du cabinet Protourisme, nous éclaire sur les véritables enjeux de cette réforme.

BFM TV – 15 juillet 2025 – Interview de Didier Arino

Le vrai problème n’est pas le nombre de jours fériés

Contrairement aux idées reçues, la France ne compte pas plus de jours fériés que ses voisins européens.

« Il y a 2 jours de moins qu’en Allemagne, mais l’Espagne, l’Estonie ou le Luxembourg en ont plus. Nous sommes dans la moyenne des pays européens », Didier Arino.

Le problème fondamental n’est donc pas le nombre de jours de congés, mais plutôt le volume de Français qui travaillent.
Cette mesure pénaliserait par définition ceux qui travaillent, en leur retirant des jours de repos.

Un impact économique sous-estimé : jusqu’à 1 milliard d’euros en jeu

Des retombées économiques considérables

Chaque jour férié génère entre 300 à 500 millions d’euros de retombées économiques selon les circonstances et la météorologie.
La suppression de deux jours fériés pourrait donc représenter une perte pouvant atteindre 1 milliard d’euros par an pour l’économie française.

Un écosystème touristique fragile

Au-delà des acteurs directs du tourisme, c’est tout un écosystème qui bénéficie de ces jours de congé :

  • Les ostréiculteurs qui vendent leurs huîtres sur le littoral
  • Les restaurateurs et commerçants locaux
  • Les artisans et producteurs régionaux
  • Les services de proximité dans les zones touristiques

Les vertus méconnues des jours fériés pour le tourisme

Une désaisonnalisation bénéfique

Ces jours fériés permettent une meilleure répartition des flux touristiques tout au long de l’année. Ils contribuent à :

  • Décaisonnaliser le tourisme français
  • Réduire les pics de fréquentation et le phénomène de sur-tourisme
  • Maintenir des prix plus accessibles pour un tourisme plus social
  • Mieux répartir la pression sur les territoires d’accueil

Un soutien vital pour les territoires ruraux

Dans de nombreux territoires menacés de désertification, le complément d’activité touristique est vital pour maintenir les services de proximité.
Sans cette dynamique économique, bon nombre de villages risqueraient de perdre leur pharmacie, leur boucher ou leur boulanger.

« Bon nombre de nos territoires deviendraient des déserts touristiques sans le complément de l’activité touristique ».

Les risques d’une concentration des congés

Une flambée des prix inévitable

Concentrer les congés sur quelques périodes aurait des conséquences directes :

  • Augmentation des prix pendant les périodes de pointe
  • Diminution de l’accessibilité du tourisme pour les classes moyennes
  • Pics de fréquentation plus difficiles à gérer pour les territoires
  • Pression accrue sur les infrastructures et les habitants

Un tourisme moins social

Cette concentration des congés risque de transformer le tourisme français en un secteur moins accessible, réservé aux plus aisés capables de payer les prix élevés des périodes de forte demande.

Le marché domestique, pilier du tourisme français

Alors que la France a reculé à la 4e place mondiale en termes de retombées des clientèles étrangères, le marché domestique est devenu capital.
Ce sont aujourd’hui les Français qui soutiennent l’économie touristique de nombreux territoires.

« Il faut veiller à ce qu’il y ait un équilibre et il faut que les choses soient pensées »,

met en garde Didier Arino, qui craint que cette mesure ne soit prise « à l’emporte-pièce » sans réelle réflexion sur ses conséquences.

Une mesure politiquement et économiquement risquée

Des économies surestimées

Les véritables économies que pourrait générer cette mesure soulèvent des interrogations légitimes.
Les bénéfices financiers pourraient s’avérer bien plus faibles que prévu sans prendre en compte l’impact négatif sur la société française.

Un risque social majeur

Pour les Français, les vacances et les jours de congé sont fondamentaux depuis 1936.
Cette tradition fait partie de l’identité sociale française et répond à un besoin profond de « breaks » réguliers tout au long de l’année.