20 ans de travaux, près de 900 millions d’euros investis. Le Grand Musée Égyptien, inauguré cette semaine au cœur du plateau de Gizeh, représente un pari colossal pour redynamiser une destination touristique fragilisée par une décennie de crises.

Analyse de Didier Arino, directeur de Protourisme – Passage M6 du 1er novembre 2025

Un tourisme égyptien fragilisé depuis 10 ans

« Le tourisme égyptien a été très fortement impacté de 2010 à 2020 par une succession d’événements déstabilisateurs : le printemps arabe, les attentats, le Covid, les événements à Gaza », analyse Didier Arino.


Une décennie noire pour une destination dont l’attrait majeur reste la culture et le patrimoine millénaire.

Face à cette érosion de la fréquentation, l’Égypte a décidé de miser massivement sur son atout maître : son patrimoine culturel exceptionnel.

Le pari du Grand Musée du Caire

Inauguré cette semaine au cœur du plateau de Gizeh, ce musée exceptionnel compte sur un positionnement stratégique remarquable : à proximité immédiate des pyramides, il pourrait attirer entre 5 et 8 millions de visiteurs par an.

L’ambition du gouvernement égyptien ? Que ce musée contribue pour moitié au doublement de la fréquentation touristique du pays.

Des atouts exceptionnels

« Ces 7 millions de visiteurs potentiels pourraient véritablement transformer la dynamique touristique égyptienne », souligne Didier Arino.

Le musée réunit des trésors uniques qui n’ont jamais été rassemblés en un seul lieu :

  • La galerie Toutankhamon avec 5500 objets, dont le célèbre masque d’or funéraire
  • La statue monumentale de Ramsès II (11 mètres de hauteur, 83 tonnes)
  • 100 000 artefacts couvrant 5000 ans d’histoire, de l’époque pré-dynastique jusqu’à l’Égypte romaine
  • 500 000 m² d’espace muséal

Le complexe capitalise également sur la proximité immédiate des pyramides de Gizeh, créant ainsi un pôle culturel d’une densité exceptionnelle. Un aéroport a même été construit à 30 km du site pour faciliter l’accès international.

Un investissement pharaonique

Les chiffres du projet donnent le vertige :

  • 20 ans de travaux avant l’ouverture
  • 900 millions d’euros de budget total
  • 500 000 m² de surface
  • 100 000 artefacts exposés
  • Objectif : 5 à 8 millions de visiteurs par an

Déclaré par le pouvoir égyptien comme « le plus grand édifice culturel du 21e siècle », ce complexe monumental incarne une stratégie de relance touristique par l’investissement culturel massif.

De nombreuses inconnues subsistent

Malgré l’ampleur exceptionnelle du projet, de nombreuses questions restent en suspens.


« L’Égypte mise tout sur son patrimoine culturel, mais la réussite dépendra de nombreux facteurs déterminants », prévient Didier Arino :

  • La stabilité géopolitique dans la région
  • L’accessibilité et les infrastructures de transport
  • La qualité de l’accueil et des services touristiques
  • La capacité à structurer une offre touristique globale cohérente autour de ce joyau

« Le musée est un outil exceptionnel, mais il ne suffira pas à lui seul », rappelle le directeur de Protourisme. « La transformation d’une destination touristique nécessite une approche systémique : qualité de l’hébergement, restauration, services, sécurité, formation du personnel, politique tarifaire… »

Les perspectives

Reste à voir si l’équation économique sera viable et si l’Égypte parviendra à reconquérir sa position sur le marché du tourisme culturel international.

Ce projet représente un cas d’école fascinant pour tous les acteurs du secteur touristique : peut-on relancer une destination en crise par un investissement culturel massif ? Les 900 millions d’euros investis seront-ils suffisants pour inverser une tendance de dix ans de déclin ?